Veille & tendances · Conférence Webedia du 21 mai 2025
Aujourd’hui, le visionnage d’un contenu n’est plus passif. Que ce soit une émission télé, un tournoi e-sport ou un live sur Twitch, le spectateur est devenu un acteur à part entière. Les réseaux sociaux servent de plateformes pour commenter, critiquer, applaudir en temps réel. Ce phénomène bouleverse les formats classiques, qui doivent désormais intégrer cette interaction quasi instantanée.
Je te vois toi qui commente L’Île de la Tentation, The Voice, Koh-Lanta sur X (ex-Twitter), ou encore qui fait le recap de L’Amour est dans le Pré / Mariés au Premier Regard sur TikTok. Tu n’es pas seul(e), c’est devenu LE réflexe. Cette interactivité transforme l’expérience en un véritable événement social, presque un sport national comme on dit.
Et ça ne concerne pas que les téléspectateurs : les marques et plateformes s’adaptent. Certains programmes intègrent désormais des votes en temps réel, des réactions à l’écran, voire du contenu généré par les spectateurs eux-mêmes (coucou Twitch et ses streamers coproduits par leur chat).
Le contenu, c’est un peu comme une boule de pâte à modeler géante : On le tord, on l’étire, on le décline dans tous les sens. Podcasts, stories, vidéos longues, mini-séries, AR, VR, lives… Une seule idée peut donner vie à 15 formats différents, et ce n’est clairement pas prêt de s’arrêter.
Mais ce n’est pas qu’une question de formats. C’est surtout une question de storytelling. Une série peut aujourd’hui teaser ses personnages sur TikTok avant même sa sortie télé, offrir des épisodes bonus en podcast, ou prolonger son univers via un jeu ou un événement immersif.
L’objectif ? Toucher plusieurs audiences, là où elles sont. Chaque format devient une porte d’entrée, chaque plateforme un pont vers une nouvelle communauté.
Et puis… il y a Sabrina Carpenter dans Fortnite. Oui, on en est là. Un concert virtuel + une esthétique Pinterest-friendly + une track virale sur TikTok = le cocktail parfait pour capter un public jeune, fun, et qui scrolle à la vitesse de la lumière. C’est donc ça, le métavers ? Peut-être bien.
Aujourd’hui, il faut penser ses contenus comme un univers cohérent et fragmenté. Chaque format est une facette d’une même histoire. Chaque plateforme, une brique de narration. Et c’est ce patchwork (bien pensé, bien incarné), qui génère de l’engagement.
Si les spectateurs créent du contenu autour des programmes (coucou les threads X sur Koh Lanta ou les recaps TikTok de Mariés au premier regard), les marques médias, elles, prennent une longueur d’avance. On entre dans l’ère des formats pensés pour s’étendre. Une émission, une série ou un talk ne s’arrête plus au générique de fin : Elle se prolonge dans un écosystème éditorial maîtrisé et pensé en amont.
🎥 France TV Slash décline ses séries en versions bingeables, clippables, mais aussi en contenus pensés pour Insta ou TikTok.
📱 Brut transforme ses sujets en docus, formats TikTok, reels ou stories éducatives.
🎙️ TEDx ou ELLE prolongent leurs interviews en capsules audio, extraits snackables ou formats croisés.
🧠 Dr Good surfe sur la pop culture pour décrypter la santé mentale : Ils analysent par exemple les relations toxiques chez Chuck & Blair (Gossip Girl) ou Joe (You), pour créer du contenu à la fois engageant et pédagogique.
L’objectif : faire vivre le programme bien au-delà de sa diffusion initiale, toucher plusieurs audiences via plusieurs points d’entrée, et créer une narration pensée selon les formats, les moments, les plateformes, et les usages.
On n’est plus dans la simple réaction post-diffusion. On construit un système solaire éditorial : Emission TV, stories Insta, TikTok backstage, podcast analyse, meme Reddit… Chaque contenu devient une brique d’un univers cohérent, piloté et calibré pour capter l’attention là où elle est.
Longtemps donné pour mort (ou au moins sous respirateur), le téléviseur fait un vrai come-back dans nos salons… mais pas forcément de la façon dont on l’imagine.
On passe en moyenne 4h par jour devant la TV en France (source : Médiamétrie). Et non, ce n’est pas juste Mamie qui regarde le 13h. C’est toute une nouvelle génération d’usages qui s’invitent dans le cadre noir. Ce qui a changé ? Le contenu, pas le device. Autrefois réservé au linéaire pur jus, le téléviseur accueille désormais un melting-pot de formats et de plateformes : Les chaînes en linéaire (toujours là, si si), les contenus délinéarisés (replay, plateformes des chaînes), la SVOD (Netflix & co), l’AVOD (avec pub, type Pluto TV), la BVOD (vidéo à la demande par les chaînes : myTF1, France.tv…), les FAST channels (Free Ad-Supported TV), les jeux vidéo, la musique, les podcasts, et même TikTok en version grand écran chez les plus jeunes (true story).
Le téléviseur devient donc un hub de contenus à la carte. On le regarde seul, à plusieurs, en mode actif ou passif, en s’immergeant dans une série ou en fond pendant qu’on scrolle. Bref, c’est un écran multi-identités, et c’est ce qui le rend si résilient.
En 2025, le passé fait un retour très remarqué. Séries, émissions, icônes cultes… les années 2000 reprennent vie, réveillant chez les millennials une douce nostalgie.
Loft Story revient avec Culte, Fred & Jamie rallument les caméras, Lilo & Stitch passent au live action, et un spin-off de Buffy est en préparation. Ce revival n’est pas juste un effet de mode : C’est une réponse à une époque anxiogène, un refuge pop qui rassure.
Ces formats agissent comme des repères émotionnels, des madeleines visuelles dans un monde instable. Même le générique de Motus a droit à sa fanbase TikTok.
La force de cette nostalgie ? Elle crée un langage commun. De Kaamelott à « Allô ? Non mais allô quoi », ces répliques font lien entre générations. Et le come-back de la Star Ac, coanimée par Karima Charni (ancienne candidate), boucle la boucle façon doudou cathodique 2.0. (Terrafemina prévoit d’ailleurs une nouvelle chronique animée par elle, orientée pop culture féminine : On surveille !).
Bref, la nostalgie n’est pas figée. Elle vit, se réinvente, et offre aux marques un terrain riche pour créer du lien sincère, culturel et générationnel.
Dans un monde en pleine mutation, les spectateurs réclament plus que du divertissement léger. Ils veulent du vrai, du vécu, du profond et surtout des histoires qui parlent de leurs réalités, avec leurs doutes, leurs failles, leurs complexités. Le genre “coming of age”, ces récits qui accompagnent la sortie de l’enfance vers l’âge adulte explose en 2025 comme un miroir d’une génération en construction, à la fois vulnérable et résiliente.
Never Too Late, par exemple, a lancé son premier épisode sur TikTok, avec des contenus en backstages côté acteurs, pour une immersion totale. Narration fragmentée, rythme mobile-first, mais fond ultra-authentique. Même logique pour Dates In Real Life, qui parle d’amour post-pandémie avec réalisme et fragilité. Ce type de formats ne se contente plus de raconter. Ils ouvrent la parole, créent du lien, posent des questions. Santé mentale, diversité, solitude, engagement : On est loin du storytelling lisse. Ce que cherche cette génération ? De l’authentique. Du brut. Des récits personnels, imparfaits, qui sonnent juste. C’est cette sincérité-là qui crée une vraie connexion et de l’attachement durable.
À l’heure d’un monde en mouvement permanent, on sent clairement deux grands courants pour se divertir : Ceux qui veulent douceur, légèreté et réconfort, et ceux qui cherchent à crier, râler, exorciser. Chacun sa thérapie. Douceur ou exutoire.
🍭 Le feel good, ou l’art de la pause sucrée
Ici, pas de prise de tête. On veut du sucré, de l’amour, de l’amitié, du chill, presque un peu naïf, comme un bonbon qu’on déguste sans culpabiliser. Un univers où flâner, butiner des épisodes ou contenus courts, s’évader doucement, ça suffit largement.
Quelques exemples qui font mouche : Nobody Wants This (série) incarne cette vibe feel good avec une approche légère et pleine d’humanité. Ou encore les pubs Intermarché avec ses histoires touchantes, qui nous rappellent que la douceur peut venir des petites choses du quotidien. Ce type de contenus nous offre une bulle où la vie n’est pas une course, mais une promenade. Parfait pour recharger les batteries.
🧨 Le feel mean, ou la revanche en mode badass
À l’inverse, certains veulent tout balancer, s’immerger dans la brutalité, le cynisme, les anti-héros, avec des codes moraux flous, parfois bien tordus. On est loin des super-héros propres sur eux, là c’est plutôt la rage, la vengeance, le mépris des règles.
Exemples : Le film The Substance, qui pousse le cynisme à fond, La série The Boys, où les super-héros sont tout sauf gentils, Et bien sûr Deadpool, le roi des anti-héros sarcastiques. Ces univers sont des catharsis collectives, où on se permet de lâcher prise, de râler, de se venger par procuration, ça fait un bien fou.
Aujourd’hui, les fans ne sont plus de simples spectateurs passifs. Ils sont ultra-engagés, prêts à défendre leurs œuvres, leurs idoles, et à réclamer un accès privilégié. Prenons l’exemple de “Tout le bleu du ciel” : l’adaptation d’un livre très apprécié a déclenché un bad buzz parce que certains fans ont jugé la série trop éloignée de l’œuvre originale. Résultat ? Une véritable levée de boucliers sur les réseaux, avec critiques virulentes adressées à l’auteur et aux producteurs.
Les réseaux sociaux s’enflamment régulièrement après des concerts comme ceux de Bad Bunny ou Lady Gaga, où certains dénoncent la présence de “faux fans” ayant réussi à obtenir des billets, au détriment des vrais passionnés. Un sujet qui alimente moqueries et débats.
Le phénomène a commencé sur Twitch, où les créateurs donnent un accès prioritaire à leurs followers les plus engagés. En 2025, Instagram et YouTube adoptent la même stratégie : ils développent des outils permettant aux artistes et influenceurs de distinguer leurs vrais fans, ceux qui commentent, likent et partagent régulièrement, et de leur offrir des avant-premières, du contenu exclusif, voire des rencontres privilégiées.
L’intelligence artificielle a fait un bond phénoménal ces dernières années, et en 2025, elle n’est plus seulement un outil d’aide, mais un véritable acteur de la création. Voici comment elle évolue, du plus simple au plus impressionnant :
💬 Doublage multilingue automatisé & aide à la reformulation
🧠 Analyse de scénario & arcs narratifs
📝 Création de dialogues & pitchs
🎭 Re-création de voix (ex : maladie de Charcot)
🖼️ Deepfakes, morphings bluffants (Ici Marylin Monroe)
🎬 Vidéos & sons 100 % IA.
En résumé : L’IA, ce n’est plus juste un petit outil discret : c’est presque un co-scénariste. Certaines boîtes l’utilisent pour tester des twists narratifs, générer des scripts prototypes, et même prédire quelles fins feront le plus réagir (👀 Black Mirror style). Mais (heureusement ?) c’est encore le cœur humain qui décide de l’émotion à viser. L’IA, elle, exécute. Pas de panique, ChatGPT ne volera pas ton César.
L’entertainment ne se contente plus de raconter des histoires ou diffuser des événements : il fait vivre une expérience, souvent multi-écrans, multi-espaces, et multi-sens.
⛵ Vendée Globe x Virtual Regatta
Pendant que les skippers bravent les océans, des milliers de joueurs les accompagnent en temps réel dans la version virtuelle. Résultat : une compétition en double, réelle + digitale, où la communauté ressent, comprend et joue la course comme jamais.
🏟️ Super Bowl au Grand Rex
Fini le canapé : on partage l’événement en salle, en grand, en live, avec animations, écrans géants et ambiance survoltée. La preuve que l’entertainment peut donner envie de sortir de chez soi pour vivre quelque chose de vraiment collectif.
🎶 Bob Sinclar pour Koh-Lanta
Un DJ set en direct des Philippines pour clore la finale de Koh-Lanta ? Une passerelle parfaite entre musique, télé-réalité et event, pensée pour créer un moment fort, connecté et inoubliable.
🎬 Et côté fiction ? Même logique.
Avec Dear You (Prime Video), les productrices Charlotte Denaud et Élise Castel mêlent récits générationnels, formats courts, castings digitaux et thématiques ancrées dans le réel. Une fiction sincère et dynamique, conçue pour une jeunesse urbaine, connectée et exigeante.
Les audiences d’aujourd’hui ne vivent plus l’entertainment en silos bien séparés. Elles font sauter les cloisons, explosent les cases, et surtout, elles s’emparent des contenus pour les faire vivre à leur manière, en mixant plateformes, formats et usages.
Les usages (dé)font les règles, et c’est cette dynamique qui réinvente le divertissement. L’envie de s’évader, de vibrer, de partager reste inchangée — ce sont les formes qui changent.
Pour reprendre un conseil de Mathieu Le Bihan, Directeur Adjoint Publicité et Réseaux Sociaux chez SNCF Voyageurs, TGV INOUI : Quand on n’est pas « born to be fun », il faut apprendre à communiquer avec une dose d’entertainment. Comment ? En s’adaptant aux usages : parler des festivals, de Disneyland ou des événements accessibles grâce aux trains, c’est autant d’opportunités de créer du lien tout en restant fidèle à sa marque.
En bref, ces 10 tendances redéfinissent un paysage mouvant, où créativité, technologie et interaction humaine cohabitent pour faire de l’entertainment une expérience toujours plus riche, inclusive, et surtout… divertissante !
Ces visions sont nourries par les regards croisés de Marion Bories, Xavier Perret, Marion Bettiol, Xavier Rambert, Mathieu Le Bihan, Elise Castel, Charlotte Denaud, Julien Thomas.
Le futur du contenu est déjà là. Et si on y allait ensemble ?